La loi du 7 enseignée aux deux dés
Me voici retrouvant ce canevas remisé dans un coin de la maison et oublié depuis le dernier déménagement. Il est pourtant très précieux à mes yeux parce que fait consciencieusement des mains de ma mère. Je décide après l’avoir quelque peu dépoussiéré et ravivé de le suspendre au mur de la pièce qui me sert de bureau. Je le trouve particulièrement attachant, d’abord pour la raison qu’il me semble lire en chacun de ses points une pensée de ma mère, et puis bien sûr en raison du sujet qu’il évoque. Je m’enquiers du nom de l’auteur: Bartolomé Esteban Murillo (1618-1682) et de l’œuvre originale, ce qui me permet de réaliser que le motif du canevas n’est qu’une représentation simplifiée de l’original.
Sur ce dernier, la main du garçon jetant les dés semble leur ordonner un chiffre, ces doigts spiralés me renvoient à l’image de ces galaxies de l’univers et à la parole du grand physicien : «Dieu ne joue pas aux dés».
Mais pour rien au monde, aussi précieux fut-il, je n’accepterais qu’il se substitue au canevas empli des yeux de ma mère. J’imagine la remarque que ne manqueraient pas de m’adresser d’éventuels amis juifs : "Comment ? Vous comprenez et défendez l’attachement à un objet familial et vous ne saisiriez pas la puissance du lien de sang qui nous unit à notre religion?"
Cette réflexion m’a conduit à considérer que si je demeure attaché au canevas non pour le sujet artistique, mais pour le travail que ma mère y avait consacré, je ne trouve en finalité rien de plus abouti que l’original dans lequel Dieu s’amuse à deux dés avec Son Esprit, pour inscrire en eux la règle de probabilité qui favorise un total de 7, tandis que Son Fils nous interroge du regard, croquant ce pain qu’Il sera tout disposé, malgré son dénuement, à partager avec nous.
Trois jours plus tard dans mon jardin…
vendredi 22 mai 2020, trois jours après la rédaction de "Joueurs de dés"
Ce «dé» s'appelle « trichie », variété de cétoine.